Mon copain Keul vient de me rappeler que je n'ai pas respecté une loi des sites web bédéphiles francais. Bah oui, ça parle de mangas ici, donc de bandes dessinées. Et en France, il est important de suivre quelques règles. Une d'entre elles est fort simple :

Il faut dire que les éditions Soleil, c'est de la merde.

Soleil édite du manga, mais on s'en tape. Par exemple, ils font Di-Gi Charat ; j'ai eu l'occasion de discuter dans le métro parisien avec Flo, le traducteur... et autant ce type peut être décrit comme le gendre idéal, autant je ne l'ai jamais vu s'emporter ainsi alors qu'il se remémorait la souffrance de ce labeur. J'en ai conclu que traduire DGC, c'est comme se faire émasculer avec un sucre d'orge rose fluo : ça prend du temps, ça fait mal, et à cause du sucre, le sang coagule pas, ça ne cicatrise pas et on en met partout. Un pote qui collectionne tous les mangas "moé" de la création considère son tome de Di-Gi Charat comme la pustule de sa bibliothèque. Voilà pour la collection Soleil Manga.

Soleil, c'est comme les éditions FJM pour la presse ; ça publie tout et n'importe quoi pour inonder le marché et étouffer la compétition. Ou comme les autobiographies écrites par des nègres qui nous font croire qu'on peut prononcer l'équivalent de 113 pages en dix secondes. C'est de la merde. Si vous cherchez de la bédé francaise dépourvue de scénario, de saveur, avec des couleurs tirées d'une même palette Photoshop utilisée pour 90 albums différents, avec des "effets manga" genre gouttes de sueur et couleurs de cheveux bizarres à chaque page, mangez du Soleil.
Bref, je n'avais jamais parlé de Soleil dans cette colonne, et Keul m'a rappelé à l'ordre. Pourquoi le manga bouffe complètement le marché français ? Si la franco-belge se fait fumer (ho ho ho), c'est parce que pour un nouveau Blacksad, il y a dix albums pourris de blagues sur les blondes/profs/psys/etc. Le neuvième art européen observe le succès des mangas, et en tire une leçon : si ça marche, c'est parce que c'est une industrie éditée à la chaine. A lui seul, Titeuf a prouvé aux éditeurs que le sous-Petit-Spirou, la resucée de Cédric, le dessin de merde allié à un humour pipi-caca, se vend plus que du Van Hamme ou du Loisel. Un pays se dessine la bédé qu'il mérite.

C'est une série d'albums vendus à 9,45 €, le premier étant sorti l'été dernier. Le scénariste se nomme LOL, le dessinateur est MDR, le coloriste HUM - aucune autre mention à l'intérieur, pas de remerciements ou quoi que ce soit. C'est censé raconter les tranches de vie de djeunz "accros à MSN", à travers leurs conversations. Extraits que vous pouvez télécharger depuis le site de l'éditeur :



Pendant ce temps, sur bashfr.org, site recensant les perles des discussions sur IRC :



Encore !





Une dernière !






Tout le reste est identique : l'intégralité des vannes vient de bashfr. Attention, pas d'internet, pas de msn, pas de blagues éculées, non, juste de bashfr. Vuillemin et ses sales blagues de l'Echo a au moins la sagesse de rappeler au début de chaque recueil que ces plaisanteries sont issues d'un patrimoine commun (et que ça fait peur), la source étant perdue depuis longtemps. Et accessoirement, lui, il a du talent pour donner ce ton si rabelaisien à ses planches. Les éditions Soleil se servent sur un seul site, qu'elles n'ont même pas eu la politesse de prévenir, dixit les admins.

Oh, pas besoin d'en appeler à la justice. C'est un cas avéré de plagiat, certes. Bashfr ne revendique pas la propriété des perles hébergées sur le site (Dieu merci), mais Soleil n'hésite pas à demander de l'argent pour ça. Le "scénariste" qui se planque derrière le pseudonyme de LOL est un connard, c'est un fait, et son éditeur est un homme immensément riche, c'en est un autre (de fait).
Soleil ne peut pas se planquer derrière le "droit de citation", qui n'autorise qu'à la publication d'un court extrait d'une "oeuvre", ladite oeuvre étant donc la perle de quelques lignes publiée sur le site. Un "bashé" estimant que le bouquin lui porte préjudice devrait donc prouver, avec les autres membres de la conversation "bashée", que c'est bien lui et ses potes qui se cachaient derrière les pseudonymes. Et le préjudice serait uniquement financier, puisque le préjudice moral est déjà causé par bashfr (mais dont ils ne se plaignent pas, puisqu'ils auraient pu éviter la repompe dans l'album en se faisant retirer de bashfr en premier lieu, vous me suivez ?). Mais comment estimer le dédommagement financier d'une courte vanne dans un livre de cinquante pages ? Et comme les gars de chez bashfr.org ont oublié d'être cons, ils ne vont pas se risquer à défendre les droits de leurs "victimes", la plupart étant citées à leur insu ; le principe de bashfr reste d'exposer aux yeux de tous des conneries sorties lors de conversations (plus ou moins) privées, ce qui est répréhensible en soi. Dans un monde parfait, bashfr aurait pu demander à retirer l'album des linéaires, au nom de la propriété intellectuelle des textes qu'ils hébergent. Dans un monde parfait.

Ce qui m'amuse le plus dans cette histoire, c'est que l'Internet geekophile - celui qui lit bashfr - est tout colère de ce vol éhonté, mais n'a rien à proposer pour éviter que ça se reproduise ou qu'un troisième tome de la série puisse voir le jour. Ca papote, ça se "me too"-ise, ça s'improvise avocat, mais ça reste avec les doigts profondément enfoncés dans le cul. Tous les soirs, Denisot, GameOne et Arthur peuvent pomper leurs vannes et leurs vidéos sur YouTube - prouvant que la télévision a tellement peur de perdre du temps de cerveau face au Web qu'elle en est réduite à le copier - et nous soupirons dès qu'on allume le poste. Kotaku, Fluctuat et Cie peuvent faire la chenille en se passant ad nausea les mêmes citations et "infos" jusqu'à en oublier la source en l'espace de quelques heures, mais nous cliquons... Sans forcément réaliser que le simple fait de charger la page augmente leurs statistiques publicitaires, financant cette parodie de journalisme. Nous soupirons. Nous sommes une statistique soupirante qui n'en fout pas une rame, même quand on vient jusque dans nos bras, plagier nos quotes et nos bonnes blagues. Aux larmes, citoyens.

Sérieusement, c'était quand, la dernière fois que la communauté geek/nerd/otaku francophone a pris les armes médiatiques parce qu'elle s'est sentie spoliée ? Je vais vous le dire. C'était au début de l'année, quand un internaute a déterré un écrit de la candidate socialiste aux élections présidentielles où elle démontait la japanime. Le site existe toujours ; il est simple et rapide dans sa dénonciation, se contenant de laisser parler les extraits. Il n'est rattaché à aucun autre site web, ne contient aucune publicité. Pire, la mention en page de garde prétend que "ce site est le fruit d'une initiative personnelle d'information et n'est pas issu d'un quelconque parti politique". Il a fait le tour des forums, sites de news et salons de discussion. Finalement, LeMonde.fr en a parlé, précisant que l'auteur n'est certes pas militant de droite, mais participe à un blog de l'UMP. Nombre d'observateurs se sont forcés à croire que l'otaku moyen doté d'une carte d'électeur ne verrait pas son vote influencé par des considérations si mineures. Ce n'est pas mon avis.

Le fait est que pour le coup, un otaque s'est bougé les fesses, a milité et a fait assez de bruit pour être repris par un média national. Mais il a fait ça non pas par considération otakiste, mais politique. Le geek francais, lui, a trop la flemme de dénoncer haut et fort qu'un mauvais éditeur de BD vend un torchon piochant directement dans son subconscient culturel. Il se dit qu'ils sont 400 millions dans le monde à être de son avis. Il se contente de poster sur un forum dans un topic de 3000 réponses, pensant qu'il fait quelque chose, que son message soigneusement rédigé n'est pas qu'un cluster sur le disque dur d'un serveur Dell ronronnant dans un data center oublié à l'autre bout du monde. Il ne fait rien de plus. Il a la flemme de défendre cela. Alors, pendant que d'autres se font du fric sur son dos, il soupire.



Convention Epitanime 2007

TANUKIIII-CHANNELLUUU! Dimanche soir ! 21 heures ! #editotaku@irc.worldnet.net, comme chaque semaine ! C'est le dernier moment pour préparer l'Epitanime 2007 ! Il y aura Yoshitoshi ABe en invité et un stand pour le nouvel éditeur de DVD qui a les licences d'Higurashi et de Dokuro-chan !
Pour rappel, je monte à Paris chaque année rien que pour ça depuis des années, alors si vous passez dans le coin, c'est l'occasion rêvée pour me violer avec un gros extincteur rouge ! Je serai là pendant toute la convention (de vendredi soir à dimanche soir non-stop) et en ville dès mercredi soir. Envie de me montrer votre collection de doublons ou de me raconter au restau pourquoi votre obsession pour le bondage en hentai remonte à Assurancetourix ligoté dans les scènes de banquet à la fin des albums d'Astérix ? Passez ce soir sur IRC ou envoyez un mail pour réserver votre raton laveur livré à domicile pendant les journées de jeudi et vendredi ou pour avoir les signaux de reconnaissance pendant l'Epitanime ! Profitez-en, c'est une offre unique ! Et quand je dis "unique", c'est parce qu'à chaque fois qu'un gentil lecteur me rencontre en vrai, il ne renouvelle plus jamais l'expérience, filtre mon numéro de portable et obtient de son tribunal l'interdiction que je l'approche physiquement à moins de dix mètres ! L'Epitanime est le seul truc qui me motive encore à rester en vie jusqu'à l'édition suivante, à écrire avec des points d'exclamation à chaque phrase et à faire 800 km aller et pareil au retour, ne ratez pas ça !